Inde-Sri Lanka-Inde
Imprimer - English translation
Ma route : Chitradurga, Hiriyur, Shravanabelagola, Mysore, Hunsur, Bylakuppe, Virarajandrapet, Thalasseri, Kozhikode, Trichur, Kochi, TrivandrumTrivandrum, Cap Comorin, du 13-03 au 5-04-2005.
Au 13 mars je démarre ma seconde année avec autant d'enthousiasme, toujours cette envie de rouler et de parcourir le monde. A la différence de mon premier départ, j'ai un an de route de fait et forcément ça aide. Je redémarre par une longue étape, proche des 150 kilomètres, passant pourrait on dire d'une autoroute pour l'Inde, à des chemins de campagne si ce n'est pas pire, et avec tout cela, les ennuis mécaniques (crevaisons et dépassement de chaîne). La chaleur n'aidant pas, je continue les levers du lit à 5 heures 15 pour partir vers les 6 heures. En 3 jours je rallie Mysore. Ce sera le lieu où je vais célébrer cette première année de vélo ainsi que mes 41 ans. Pour cela je passe une superbe soirée au Parklane Hôtel, une excellente table que je recommande. Mysore est surtout renommée pour le palais des Maharadjas, quelque chose d'exceptionnel par son architecture, ses plafonds, la beauté de ses salles, ses verreries. C'est un ensemble préservé et gardé de près. Autre particularité de la ville, c'est le marché Devaraja avec une diversité incroyable de fruits et légumes, où les couleurs et les parfums sont un régal pour les yeux et les papilles. Mais à Mysore une chose va surtout m'horrifier en apercevant un homme handicapé assis au sol qui cherche à traverser la rue, car aucun automobilistes ou cyclos ne va daigner s'arrêter pour lui laisser le temps. Au contraire on va esquisser sur lui par la droite ou la gauche, allant même à le klaxonner comme pour qu'il dégage au plus vite. L'Indien est parfois vraiment difficile à comprendre.
A présent, le cap Comorin se profile à l'horizon. Il me reste plus qu'à rejoindre la mer d'Oman puis à la longer et alors je pourrais le découvrir. En route vers le Kérala, je souhaitais faire halte dans les camps de réfugiés Tibétains à Bylakuppe. Ici vivent des gens qui ont pu échapper à l'étau chinois, certains viennent même à me raconter leur évasion, après plusieurs jours de marche, cherchant à préserver leur liberté, passant au travers de la frontière criblée de militaires armés. C'est aussi l'occasion de découvrir le temple d'or, un édifice d'une très grande beauté par ses dorures et ses peintures (leur finesse, leur qualité, leur précision, le travail demandé). Cela m'amène aussi à m'évader avant l'heure vers un pays qui m'attire, en côtoyant ces gens, en changeant de cuisine. La venue le lendemain d'une personnalité proche du Dalai Lama me fait rester avec eux. De là je continue ma route au travers du Kodagu, région parsemée de forêts, où ça devient à nouveau un vrai plaisir de rouler, en étant au calme, pour ainsi dire seul sur la chaussée, sans trafic, sans pollution, traversant de petits hameaux, rencontrant des enfants s'en allant à l'école. A mon passage ils restent figés, les yeux grands ouverts, de leurs petites mains ils répondent timidement à mes bonjours. Mais aussitôt les avoir dépassés, ils se libèrent lâchant les commentaires. Rendu là, la chaleur est devenue terrible, la douche est passée au rythme de 2 à 3 par jour. Il devient même difficile de l'avoir froide, pourtant on la cherche, car l'eau des containers est passée tiède voire chaude. Le soir venu, le simple fait de rester sur le lit en espérant le repos, on sent les gouttes s'échapper et perler le long du corps.
Je viens donc à passer au Kérala, et à rejoindre la côte de Malabar. C'est le dernier état avant de toucher celui du cap. Je continue à me trouver dans une végétation dense, principalement palmiers et cocotiers. La route étant la principale à descendre vers le sud, le trafic redevient infernal, allant dans tous les sens, devant se méfier de tout ce qui m'entoure, car personne ne prend garde à moi, je me demande parfois si l'on me voit. C'est à moi seul d'assurer que rien ne m'arrive, et d'éviter l'accrochage. De cette région ressort une variété et une quantité incroyable de fruits. En permanence le long de la route, les étals en sont garnis avec raisins, bananes et mangues de différents types, ananas, citrons, pommes, oranges, et d'autres qui ne sont pas de ma connaissance. Cette descente va être marquée par des problèmes à répétition avec le vélo, se produisant bientôt tous les jours, avec les pneus qu'il faut recoudre sur les flancs et surtout des crevaisons. Cela ira au comble, par déjanter, et forcément un éclatement rendant le tout hors d'usage et devant avoir recours au bus. Tout cela m'amène à l'inquiétude pour atteindre le cap, car aucune pièce de rechange ne peut se trouver. Je viens alors à modifier mon itinéraire, en éliminant une remontée par le Tamil Nadu vers la côte est et Madras, ma route sud se terminera là. Ne pas le découvrir serait une grosse déception et chaque jour j'essaie de repartir avec un vélo du mieux possible. Je fais passage à Trichur au moment de Pâques et découvrir les processions du Vendredi saint dans les rues. Une vraie ferveur chrétienne est présente ici. L'arrêt à Kochi ne reste pas quelque chose d'exceptionnel, y ressort une grosse activité portuaire avec des cargos, des porte-containers, des pétroliers. Seul Fort Kochi est plus calme et plus agréable avec les énormes carrelets des pêcheurs, et toute l'activité des épices. Des petits entrepôts s'échappent les odeurs de tout ce qui viendra parfumer et donner plaisir à la cuisine indienne. Le sud de Kochi est marqué par les backwaters, tout un réseau de canaux, de lacs au milieu des cocotiers. Un trajet à bord d'un bateau me permet de profiter de ce milieu particulier, et d'une nature totalement intacte. Derrière tous mes ennuis, heureusement je vais pouvoir parcourir une longue étape, au delà des 150 kilomètres pour arriver à Trivandrum. Cette fois je suis plus qu'à une journée du cap. Le besoin de remettre le vélo en état reste toujours impossible, je fixe alors mes espoirs sur le Sri Lanka. Depuis Jaisalmer, aucune rencontre de cycliste n'a eu lieu. A Trivandrum je fais la connaissance de André, un adepte du vélo couché originaire du Québec et parti du Vietnam. Il a une longue avance sur moi puisqu'il approche de sa sixième année. Ma dernière étape va se faire le 5 avril et enfin pouvoir découvrir le cap Comorin. C'est une énorme joie d'arriver là et une grande satisfaction. Avec le cap Nord, j'ai rallié 2 points extrêmes, avec une distance de 10000 kms parcourus entre les deux. Je prends le temps de savourer ce moment en restant sur place 2 nuits, et bien sûr en marquant le souvenir par la photo, avec la porte d'entrée indiquant "bienvenue à Kanyakumari", mais aussi avec la statue Thiruvalluvar, les pieds dans l'eau, qui semble là en surveillance sur les lieux.
Avant de remonter je dois faire un saut jusqu'au Sri Lanka pour formalité. Le vélo de reste en Inde limite le séjour. J'ai la chance de pouvoir m'approvisionner en pièces. Le retour jusqu'à Delhi se fait en train, plus rapide que le vélo mais qui demande quand même 53 heures de patience. Je peux retrouver mon ami Shubho et sa famille. Me reste à présent à préparer la suite du périple en remontant le vélo à neuf et effectuant une nouvelle demande de visa. Une autre longue route se trace, parcourir l'Himalaya dans la partie nord de l'Inde, passer au Pakistan pour m'en aller via la Karakorum Highway jusqu'à Kashgar en Chine et alors rejoindre Pékin.